J'étais Mike Bossy aussi

Publié le 20 avril 2022 à 6h59
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Décembre 1982, j'ai 9 ans et toute la vie devant moi. Les joueurs sur ma table de hockey sont Les Canucks de Vancouver de Richard « Le Roi » Brodeur et les Islanders de New York de Mike « The Boss » Bossy!

J'ai 9 ans et aucun talent de joueur de hockey. J'ai plein de cartes O-Pee-Chee, plein de cartes recrues avec lesquelles je joue sur mon lit, bordé d'une douillette de la Ligue nationale de hockey. Je ne veux le dire à personne, mais je suis persuadé que je suis le fils spirituel du « Boss » Bossy.

Je me voyais très bien quitter mon Lachute natal pour être sur les grandes affiches de Broadway. Marquer 50 buts par année par-dessus 50 buts. Redéfinir le jeu à coup de tirs du poignet, être littéralement le métronome de Long Island, battre la mesure partie après partie. Je me voyais les cheveux au vent, porter le numéro 22.




À Noël, ma mère petite femme de ménage de son état m'a acheté un chandail officiel de LNH. Moi, le pauvre petit garçon du fin fond de la rue Fillion, j'ai reçu le chandail numéro 22 de Mike Bossy. Il ne venait pas du père Noël, ce chandail. Il a été gagné par ma mère à coup de ménage, de dur labeur, de sueur, d'huile de bras de femme de ménage. Ma mère, la Mike Bossy des femmes de ménage, la John Tonneli, la Bryan Trottier, et parfois, même, choquée, la Billy Smith!

J'avais le sourire du Joker dans la face ce soir-là, celui de Joaquin Phoenix. Le sourire fendu jusqu'au « z'oreille ». J'ai joué avec ma table de hockey seul vêtu de Mike Bossy, j'étais Mike Bossy. Je ne pouvais pas jouer avec mon petit frère qui finissait par se tanner de perdre, puis, chaque fois, il essayait de briser ma table! Dans ce temps-là, je jetais les gants comme Clark Gillies! Ce soir-là, à la lueur des lampadaires dans le fond de la rue Fillion, j'ai sorti mon vieux filet de hockey « avec pu » de filet ou presque. J'ai pelleté de la neige de décembre, celle qui tombait comme dans ces boules de Noël qu'on brassait pour s'amuser.

J'arborais par-dessus mon manteau d'hiver trop long mon beau chandail numéro 22. Mike, moi et les Islanders avons gagné la Coupe Stanley encore une fois. Mike et moi avons marqué le but gagnant. Un tir du poignet dans le haut de la lucarne. Un but dans un 7e match en prolongation de surcroît. Mike et moi avons soulevé la coupe au bout de nos bras. Nous avons aussi remporté le trophée Conn Smythe, remis au meilleur joueur des séries, mais qui d'autres que Mike et moi, mais surtout Mike.

Ce soir-là, j'ai dormi avec mon chandail de Bossy, j'avais même étalé sur mon bureau toutes les cartes des Islanders de l'édition de 1982, celle de leur troisième coupe. Je me rappelle plus tard avoir aussi bien dormi par la suite.

Vendredi 15 avril, Mike n'est plus! Il a donné son dernier souffle. Il laisse dans le deuil des petits Mike Bossy comme moi et tant d'autres. Il laisse surtout dans le deuil sa femme, ses filles et ses petites-filles.

Au-delà du hockey qu'il est écrit et dit haut et fort : Mike Bossy, si bon fût-il, il était encore un meilleur humain que le joueur de hockey. Un bon mari, un bon père, un bon grand-père, un bon humain.

Un humain exceptionnel est mort le 15 avril 2022.

* À Noël, ce n'est pas le père Noël qui ne m'avait donné le chandail de Bossy ni ma mère, quoiqu'un peut en quelque sorte. La femme de ménage presque analphabète a écrit une lettre à Mike Bossy de sa main de femme mal habile, de femme pauvre, de femme qui aime son fils. Le chandail a été donné par Mike Bossy lui-même, j'étais en quelque sorte Mike Bossy, aussi.
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20 Avril   |   317 réponses
J'étais Mike Bossy aussi

Mike Bossy est-il l'un des plus grands de l'histoire?

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